De l’utilisation des logiciels libres
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Ce que la communauté appelle GNU/Linux est un ensemble de logiciels à
codes sources ouverts, que ce soit l’ensemble des outils GNU ou le
noyau Linux qui sont sous licence
GPL,
l’ensemble du projet Apache qui est sous
licence BSD
ou encore XFree 86 qui est sous licence
X11.
La plupart des
distributions
GNU/Linux fournissent uniquement des logiciels a codes sources
ouverts, au moins pour les versions de base. Les différentes
distributions commerciales
Mandrake,
RedHat ou Caldera)
proposent en plus des applications propriétaires (en version de test
ou en versions complètes) comme une valeur ajoutée à la distribution
normale.
Qu’est-ce que le logiciel libre ?
Un logiciel libre est un logiciel dont la licence doit répondre à
quatre libertés fondamentales :
(1) Liberté d’utiliser le logiciel, sans condition, quel que soit le but recherché ;
(2) Liberté d’étudier le logiciel, et de l’adapter à ses besoins. Il faut pour cela, disposer du code source ;
(3) Liberté de redistribuer des copies du logiciel, pour en faire profiter ses amis et ses relations ;
(4) Liberté d’améliorer le programme et publier ses améliorations, pour en faire profiter la communauté. Pour cela, il faut disposer du code source.
Je ne veux pas ici relancer le débat sur l’utilisation de logiciel
libre ou de logiciel à code source ouvert. J’utiliserai le terme de
logiciel libre, car logiciel à code source ouvert est 1) plus long à
écrire 2) plus vague.
La problématique
Le problème que je souhaite soulever ici est un problème éthique. Le
fait que les éditeurs de logiciels propriétaires développent de plus
en plus de versions de leurs logiciels pour GNU/Linux provoque
beaucoup de discussions dans la communauté. Le sujet n’est pas ici de
savoir s’il faut ou non utiliser de tels logiciels, s’ils sont
meilleurs techniquement que leurs homologues libres ou si leur
utilisation est une trahison pour les logiciels libres.
La question à laquelle je tente de répondre dans ce document est
« Pourquoi utiliser les logiciels libres ? ». La question est surtout
posée aux utilisateurs personnels et non aux entreprises. Ces
dernières ont des considérations différentes des
particuliers qui sont décrites dans De l’utilisation des logiciels libres en entreprise.
Motivation
Quelle motivation y-a-t’il pour utiliser des logiciels libres. Je
pense qu’on peut diviser cette motivation en 3 grandes composantes :
pratique : l’utilisation de ces logiciels apporte un confort que n’apporte pas un logiciel propriétaire (que ce soit au niveau du prix, de la rapidité d’exécution par exemple).
technique : le logiciel est techniquement meilleur que ces concurrents propriétaires (Linux ou Apache sont de bons exemples).
éthique : le choix pour le logiciel fait intervenir des notions plus philosophiques (liberté, culture du don)
Ces trois composantes ne sont pas cloisonnées, et souvent un même
argument se décline dans au moins deux d’entre elles. Cependant, s’il
est plus aisé d’expliquer les avantages pratiques et techniques des
logiciels libres, il est plus difficile d’expliquer en quoi l’aspect
éthique est important, voir primordial. Voyons donc chaque aspect en
commançant par l’aspect pratique.
L’aspect pratique
La gratuité est souvent mise en avant quand on parle de logiciel
libre. Pouvoir télécharger un logiciel sur le net et pouvoir
l’utiliser sans payer de redevance à qui que ce soit est certes
agréable, mais la gratuité n’est pas intrinsèquement un avantage. J’y
reviendrais plus tard dans la composante éthique, car n’est que la
conséquence d’une des libertés (la numéro 3) S’il vous plaît,
n’invoquez plus la gratuité comme un avantage ! Dites plutôt que c’est
une conséquence d’une des libertés.
Il est en effet possible de faire payer un logiciel libre, comme par
exemple sur le site de vente en ligne de la
FSF. La gratuité, ou du moins le faible coût
(d’acquisition, de fonctionnement [1], de
mise à jour) est tout de même un avantage certain quand on le compare
avec les logiciels propriétaires. Je ne parle cependant pas des coûts
de support ou du personnel exploitant des logiciels libres. Une
société d’intégration fournissant un service pour le logiciel libre a
un savoir-faire qui lui n’est pas gratuit. Cela est normal et fait
partie du modèle économique du logiciel
libre.
La facitilité d’utilisation du logiciel libre est également souvent
mise en avant, mais cet argument est totalement mal compris par les
utilisateurs d’environnement 100% graphiques. C’est cependant un
avantage pratique reconnu parmi ceux qui utilisent les logiciels
libres. Par facilité d’utilisation, on entend :
Utilisation d’outils simples qui ne font qu’une seule chose (du tri, de la recherche d’expression) mais qui s’interfacent entre eux par une méthode standard, ce qui permet de faire des choses très puissantes ;
Utilisation du mode texte (qui permet d’avoir beaucoup plus de modes de fonctionnement par le biais d’options en ligne de commande, options qu’il serait compliqué à inclure dans une interface graphique ;
Possibilité de création de frontaux graphiques utilisant les outils en mode texte avec les options les plus courantes (par exemple pour la recherche de fichiers).
Le mode de développement des logiciels libres apporte également
beaucoup à leur facilité d’utilisation. Ceux-ci ne sont pas conçus par
un groupe fermé, mais par les utilisateurs eux-même, ce qui signifie
que si une fonctionnalité est manquante, mal conçue ou incomplète, les
utilisateurs cernent rapidement le problème, et peuvent soit le
corriger, soit écrire directement aux auteurs du logiciel.
Ces outils peuvent paraître d’une difficulté sans bornes pour les
utilisateurs inconditionnels de la souris. Il est vrai que la
puissance de ces outils ne servira sans doute jamais aux utilisateurs
"normaux" [2], mais l’avantage de ces outils est d’être facilement
exploitable avec des frontaux graphiques. Cela permet de les rendre
accessible aux plus réfractaires à la ligne de commande, tout en
laissant la possibilité à ces utilisateurs de se perfectionner le jour
où ils en ressentiront le besoin.
L’aspect technique
L’aspect technique est en grande partie représenté par la libre
disponibilité [3] des codes sources d’un logiciel. Les avantages de
cette liberté sont nombreux [4].
Tout d’abord, cela permet de consulter librement le code. Il est
donc aisé d’apprendre le fonctionnement d’un logiciel, voire même
d’un système d’exploitation (FreeBSD, NetBSD ou Linux). La diversité
des logiciels libres permet donc d’avoir un aperçu des différentes
techniques utilisées pour accomplir une tâche donnée (servir une
page Web par exemple). La libre distribution du code est donc un
avantage pédagogique extraordinaire par rapport aux logiciels
propriétaires.
Cela permet ensuite d’améliorer rapidement un logiciel. Que ce soit
au niveau des fonctionnalités ou des corrections d’erreurs, les
personnes intéressées peuvent facilement lire le code source d’un
logiciel, en déceler les éventuels défauts et envoyer un correctif
aux développeurs [5]. C’est un avantage
indéniable vis à vis des logiciels propriétaires (L’impossibilité
d’avoir la source rend impossible de corriger soit-même le
logiciel). Cela conduit en général [6]
à des logiciels plus sûrs d’un point de vue sécurité, moins sujets aux
plantages et disposant de fonctionnalités évoluées.
L’utilisation de standards est un avantage technique autant que
pratique. Cette utilisation permet, d’un point de vue pratique, de
choisir n’importe quel logiciel supportant un ensemble de normes
définies dans le cadre de l’accomplissement d’une tâche [7]. L’implementation de ces standards
étant possible sans restrictions a permis le développement de
logiciels les supportant sur toutes les plates-formes (cf. point
suivant). Les standards ne sont cependant pas à l’abris, signez la
pétition d’Eurolinux.
Enfin, la libre redistribution du code, avec l’utilisation des
standards, permet d’obtenir des logiciels portables d’un
environnement matériel (Sun, IBM, Intel) ou logiciel (Solaris, AIX,
Windows) à un autre. Cela permet l’homogénéité d’une plateforme
technique [8].
L’aspect éthique
Cet aspect est souvent expliqué par un seul mot : la liberté. Un
logiciel libre doit avoir une licence qui permet un certain nombre de
chose et n’interdit pas un certain nombre d’autre chose. Je ne vais
pas ici refaire un commentaire sur l’Open Source
Definition, cette définition très claire donne les directives sur ce
que doit contenir un licence pour être appelée libre [9].
On peut trouver sur le site de la Free Software
Fundation plusieurs documents très intéressants
sur ce qu’est un logiciel libre et les libertés qu’apportent leur
utilisation :
Qu’est-ce qu’un logiciel libre ?
Les catégories de logiciels
Les termes a éviter
Les documents de la FSF insistent sur le fait que le logiciel libre n’est pas une fin en soit, mais que le but recherché est bel et bien la liberté.
L’utilisation de logiciels libre est une chose importante
car elle sert le principe fondamental de liberté. Certes, le terme liberté est vague, mais on peut y inclure les termes suivants pour être plus clair :
liberté de choix (l’utilisation des normes autorise le choix de l’outil)
indépendance (personne n’est lié à une société quelconque ou à un état)
liberté d’aider son prochain [10]
En plus de la liberté apportée par l’utilisation des logiciels
libres, la culture du
don
apporte énormément à la dimension éthique des logiciels libres. Cette culture est différente de celle du partage [11] par le fait que le don est désintéressé [12]
Je ne pense pas que beaucoup de monde se rende compte de la masse de travail qui a été nécessaire à l’écriture d’un logiciel libre comme Linux ou Apache. Ce travail a été effectué par des bénévoles (pour la plupart), sans rétribution directe pour leur travail. Les raisons pour les quelles ces développeurs ont fait ce travail sont sans doute d’ordre du plaisir (de développer), technique,
mais aussi certainement éthique (volonté d’avoir une contrepartie libre à des logiciels propriétaires, partage des connaissances).
Conclusion
Il faut en effet bien finir cet article. Je voudrai terminer par une demande à tout les utilisateurs des logiciels libres : parlez plus de liberté ! C’est en effet quelque chose dont on ne parle pas assez souvent, les intérêts invoqués étant souvent uniquement d’ordre techniques (stabilité, sécurité, etc.).
Alors posez-vous la question : "pourquoi est-ce que j’utilise des logiciels libres ?".
[1] coût en licences par exemple
[2] Lire ici les utilisateurs qui ne sont ni administrateur ni
développeurs
[3] liberté de consultation/modification et redistribution
sont remplies
[4] Les avantages que je vais citer ici
concerne surtout les utilisateurs avancés, les curieux et les
développeurs, mais leur conséquences apportent des bénéfices à tous
[5] Cela n’est certes pas donné à tout le monde. Il
faut en effet de solides compétences techniques
[6] Je dis en général, parceque le
simple fait de mettre un logiciel sous une licence libre ne le rends
pas parfait. Il faut des personnes pour l’utiliser et le corriger
[7] Comme pour
la messagerie par exemple : SMTP, IMAP et POP sont des standards, on
peut ainsi utiliser n’importe quel logiciel les supportant, que ce
soit au niveau serveur ou client. A la différence, le choix
d’Exchange ou de Domino (même si eux aussi peuvent comprendre ces
standards, mais cela est rarement utilisé) impose chacun
l’utilisation d’un seul client.
[8] C’est à dire utilisation d’un même logiciel sur plusieurs
systèmes d’exploitation, ou utilisation d’un même système
d’exploitation sur plusieurs plateformes matérielles. Par exemple :
Samba fonctionne sous AIX, Solaris, Linux, IRIX, etc.
Apache fonctionne sous AIX, Solaris, Linux, IRIX, Windows 95/98/NT/2000/XP, etc.
Linux fonctionne sur Sparc, Alpha, x86, PowerPC, ARM, etc.
[9] Il y avait il y
a encore quelque temps des différences flagrantes entre la Free
Software Fundation et l’Open Source
Initiative sur ces définitions. Il semble
que cela se soit terminé, les deux mouvements, même s’ils ont des buts
différents, reconnaissent les mêmes licences comme libres.
[10] cela peut paraître naïf/consensuel/inutile, mais cela est très important car c’est sans doute ce qui a lancé le mouvement de la FSF.
[11] qui implique un échange réciproque
[12] ce qui est faux bien sûr, mais le retour ne se fait pas immédiatement. Voir La valeur de l’humilité.
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